Nourrissages du jeune
A partir de début août les jeunes de l'année prennent leur envol.
Les premiers jours le jeune Circaète ne vole pas très longtemps, autant par inexpérience que manque d'endurance, et il ne quitte guère les abords immédiats du nid.
Dès qu'il voit un parent dans le ciel (ou au début, n'importe quel oiseau ressemblant de loin à un parent, par exemple Buse ou Milan) il crie.
Au fur et à mesure que le parent se rapproche avec un serpent ses cris deviennent de plus en plus intenses, et sont audibles de loin.
Dans ces moments particuliers, le jeune est comme hypnotisé par le parent, et le suit constamment du regard.
L'adulte venu le nourrir avec un serpent a pu repérer facilement le jeune à ses cris, il va tenter de l'inciter à le rejoindre pour lui passer le serpent.
Il lui arrive parfois de planer un petit moment dans les airs, le temps que le jeune
décolle et le suive.
C'est une occasion où l'on peut observer les Circaètes d'assez près, en ayant pris la précaution de se camoufler parfaitement dans la zone du nid en l'absence des oiseaux.
Et c'est ainsi que, dans la plupart des observations que nous avons fait en Gironde (depuis 1999), sur plusieurs années et différents sites, nous avons pu constater que, quand un adulte revient d'une partie de chasse avec un serpent, il revient toujours se poser sur le nid (ou ce qu'il en reste) pour nourrir le jeune, même après l'envol de celui-ci.
Dans les premiers jours de vol du jeune, il n'est pas rare que celui-ci ne puisse pas venir rejoindre de suite l'adulte.
Soit le parent maintient sa position sur le nid, et appelle le jeune (il arrive à émettre des cris très audibles même avec le serpent encore dans le jabot).
Ou bien il s'envole du nid, fait une boucle ou deux dans les airs, et revient se poser au nid, de façon à entrainer le jeune dans son sillage.
Il arrive au parent de faire preuve de beaucoup de patience, et d'enchaîner toute une série de manoeuvres de décollages puis atterrissages, cris, pour finalement entrer en contact avec le jeune et lui déposer le serpent.
Au début le jeune semble être peu doué pour arriver à se poser près de l'adulte, que ce soit sur le nid où sur un grosse branche à proximité.
Et puis au fil des jours sa technique de vol progresse, et un mois plus tard il lui arrive même de devancer l'adulte qui arrive avec un serpent et de se poser sur le nid avant lui, avec force cris d'appel.
Une explication possible (peut-être pas la seule) c'est que comme
nous l'avons vu pour ce qui est des nids de Circaète, les pins (Pinus pinaster) en
Gironde n'offrent pas partout des conditions favorables à la pose d'un nid.
Et en corrolaire, la forme des branches de ces pins ne permet pas toujours l'arrivée
de deux oiseaux sur une branche, (sauf sur certains pins très agés offrant de grosses et
longues branches dénudées sur une certaine longueur).
Le rendez-vous au nid semble donc la solution la plus pratique.
2002 Nourrissage laborieux, le 1/09 :
Sur un site, un adulte est venu livrer avec succès un
serpent vers 13h45.
Mais à 14h05, l'autre parent arrive à son tour pour nourrir le
jeune ! Il se pose sur le nid, le jeune essaye de tirer le serpent,
sans succès.
Le parent s'envole, fait une boucle autour du nid et revient se
poser. Deuxième essai : le jeune tente à nouveau de tirer sur le
serpent : nouvel échec.
Puis à nouveau le parent s'envole, tourne quelques instants autour
du nid, et se pose pour la troisième fois. A nouveau le jeune tire
vigoureusement sur le serpent, apparemment sans arriver à l'extirper.
Bien que l'adulte finisse par repartir avec le jabot encore
visiblement gonflé, nous voyons peu de temps après le jeune manger
par petits bouts...
Nourrissage en deux temps, le 28/09 (même site, suite) :
Nous observons de très loin l'arrivée de deux Circaètes
dans la zone de nidification, un adulte suivi d'un jeune qui quémande.
Ils descendent près de l'arbre du nid (celui-ci étant tombé au sol
depuis peu de temps).
L'adulte se pose sur une branche à 15h53, le jeune sur un pin en
face à 5 mètres environ et continue de crier. Rien ne se passe pendant
à peu près une minute.
Puis l'adulte s'envole et cercle longuement dans le ciel, on voit
nettement un bout de serpent dépasser du bec. Vers 16h il retourne
se poser au même endroit qu'auparavant, le jeune décolle de son pin
et vient enfin "sauter" dans celui où se trouve l'adulte.
La séquence de cris nous conduit à supposer que la
"livraison" s'est bien passée.
L'adulte repart, et plane plusieurs minutes dans le ciel.
Le jeune finit par le rejoindre, ils dérivent lentement,
l'adulte au-dessus, puis le jeune semble se diriger vers une direction,
l'adulte au-dessus le suit.
2003
Peu après la date d'envol du jeune, sur un site
ou le nid se trouve sur un très grand pin avec deux énormes
branches (en Y très évasé) nous assistons à l'arrivée d'un adulte avec un serpent.
Le jeune crie un peu plus loin dans le sillage de l'adulte
et essaye de le rejoindre. L'adulte fait une large boucle
au-dessus de l'arbre du nid, et quand le jeune est à proximité,
il descend se poser sur la branche en Y à notre droite, et ce
faisant il disparaît dans la végétation. Nous l'avons suivi
des yeux et savons parfaitement où il s'est posé.
Mais pas le jeune : manquant encore vraisemblablement
de coordination il se pose sur l'autre branche du Y, donc à
plusieurs mètres de l'adulte, et continue de crier...
Du coup l'adulte fait un petit saut depuis sa
grosse branche et vient se mettre bien en évidence en se
perchant en équilibre instable sur des branchettes.
Ca y est, le jeune l'a enfin repéré, il s'envole et
vient rejoindre l'adulte, qui redescend sur la grosse
branche pour lui passer le serpent.
2004
a) zone Andernos, jeune Circaète volant
depuis peu.
Un adulte arrive avec un serpent et descend sur
l'arbre du nid. Il appelle le jeune, qui a vu venir
son parent et donc "crie très fort", mais ne vient
pas au nid.
L'adulte appelle le jeune, en poussant une série
de cris d'une façon mécanique et répétitive :
" yyouk ! yyouk ! yyouk ! yyouk ! yyouk ! ...", puis il
quitte l'arbre du nid et va se percher un peu plus loin
sur une grosse branche, en appelant encore.
Le jeune, lui, continue ses cris de "quémandage",
mais ne va pas le rejoindre.
Finalement c'est l'adulte qui se déplace, et le
nourrissage a lieu sur un grand pin voisin, aux
branches très larges et horizontales.
b) zone Ste Hélène, jeune Circaète volant
depuis trois jours.
(Le nid + jeune étaient tombés au sol, un autre
nid a été créé sur un arbre voisin.)
Arrivée d'un adulte sur le nouveau nid avec un
serpent.
Le jeune vole à environ trois cent mètres du nid en
criant, pendant plus d'un minute il tourne et crie sans
arriver.
L'adulte s'envole avec le serpent toujours dépassant
du bec, et va se poser sur l'arbre du nid qui est tombé.
Le jeune arrive en criant de plus belle ... et va
se percher sur un autre arbre !
L'adulte repart avec le serpent et retourne se poser
sur le nouveau nid. Le jeune crie encore un moment sur
son arbre, puis il arrive enfin pour rejoindre l'adulte,
et le nourrissage a lieu.
2005
Dans une zone de reproduction, à mi-septembre, le nid était pratiquement
disloqué, il ne restait que quelques branchettes sur deux branches tordues qui avaient
servi de support.
Et c'était quand même "le" point de ralliement pour le nourrissage («Home, sweet home»...)
2006
Nourrissages au nid :
un couple qui avait à nouveau niché dans un nid de Buse a fini par faire
effondrer celui-ci complètement, il n'en restait plus une seule branchette.
Mais le nourrissage avait tout de même lieu sur l'arbre qui avait supporté le nid :
on peut supposer que les grosses branches offraient un lieu de rendez-vous pratique
pour les deux oiseaux.
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